Le dinosaure anachronique

Fossile en peluche

Je suis né dans une usine en 2012, mais dans ma tête je viens tout droit du Crétacé. Mes coutures grincent comme des plaques tectoniques et mes yeux en plastique brillent d’une certitude ridicule : je suis le dernier dinosaure vivant. Pas de Jurassic Park, pas de musée, juste moi, coincé sur un oreiller rose bonbon entre un lapin flasque et un lama trop zen.

Expédition dans les rêves

Chaque nuit, je pars en exploration. Mon terrain de chasse ? Les rêves de mon humain. Pendant que son corps ronfle et bave légèrement, moi je traverse des jungles hallucinées, des plaines faites de souvenirs d’école et des océans remplis de ses angoisses. Je cherche mes congénères, persuadé qu’un stégosaure planqué ou un petit vélociraptor malicieux a dû survivre dans un recoin de son inconscient.

Je tombe parfois sur des créatures étranges :

• Un prof de maths géant avec des ailes de mouette.
• Un téléphone qui hurle plus fort qu’un tyrannosaure.
• Une chaussure perdue qui réclame vengeance.

Aucun dinosaure. Pas même une dent fossile. Mais je continue.

La solitude préhistorique

Le plus difficile, ce n’est pas de ne rien trouver. C’est de supporter le silence. Les autres peluches se contentent de ronfler sur l’oreiller, mais moi, j’écoute. J’entends l’écho d’un rugissement intérieur, celui de mon humain qui se sent parfois seul, hors du temps, comme moi. Alors je comprends : je ne cherche pas vraiment mes congénères dans ses rêves. Je cherche une preuve que lui et moi, nous ne sommes pas les derniers de notre espèce à douter de notre place.

Extinction joyeuse

Alors, je fais ce que je peux. Je danse maladroitement dans ses rêves, je fais des pirouettes de diplodocus, je me coince la queue dans ses cauchemars pour les détourner. J’offre des moments absurdes, comme si l’extinction pouvait être reportée juste grâce à une bonne blague.

Et chaque matin, quand il ouvre les yeux et me voit vautré à côté de son oreiller, je me dis : mission accomplie. Peut-être que les dinosaures ont disparu il y a 65 millions d’années, mais tant que je reste debout, lui et moi, on est encore là. Pas très à la mode, mais pas encore fossiles non plus.

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